Depuis que Tamburini a dessiné la première F4 750, chez MV Agusta personne n’avait osé toucher à un seul cheveu du design extérieur de ce bijou. Dix ans plus tard, la F4 modernise son esthétique et son comportement.
La dernière fois que j’ai essayé une MV Agusta sur le circuit d’Alméria c’était au Super test organisé par Solo Moto en 2008. A cette occasion, la MV Agusta F4 R312 était la plus neuve des motos à l’essai. Je me rappelle très bien de ce modèle parce qu’il a fait naître des opinions très disparates entre les conducteurs présents: ou il plaisait ou il décevait. Il m’a plu pour plusieurs raisons, et déplu pour d’autres. C’était en effet un modèle qui vieillissait assez mal… Par chance, ce n’est pas le cas avec cette nouvelle version 2010, que nous avons eu la chance d’essayer pour vous.
Le premier défi de la nouvelle F4 a été de perdre du poids. L’ensemble s’est allégé énormément: pas moins de dix kilos en moins, la balance affiche désormais 192 kg. Cette substantielle perte de poids agit positivement sur l’agilité de la moto. La F4 se caractérise pour être la SBK aux axes les plus courts du marché, et cela aide à ressentir sa légèreté dans les changements de direction. L’ergonomie a aussi été révisée en profondeur: le nouveau réservoir, plus centré et plus petit, a multiplié les possibilités de bouger sur la moto. Désormais vous pouvez décrocher plus facilement et bouger la moto en faisant beaucoup moins d’efforts avec les bras et les jambes. La selle est plus large derrière et étroite à l’endroit de contact avec le réservoir, et nous laisse atteindre plus facilement le demi guidon qu’avant. La fourche Marzocchi a été revue: avec sa barre de 50 mm, elle est soutenue par la classique et robuste tige inférieure à trois vis, et transmet très fidèlement toute l’information de ce qui se passe sur la roue avant. Le circuit d’Alméria se caractérise par de nombreuses zones sur lesquelles il faut arriver avec beaucoup d’appui sur le train avant, et c’est ici qu’une moto marque la différence quant à la confiance que transmet sa roue avant. La nouvelle F4 atteint largement ses objectifs, avec beaucoup d’aplomb et une grande sécurité qui permettent d’entrer fortement et sans aucunes hésitations sans les virages compliqués. Sur le train arrière, le bras oscillant a été amélioré : avec plus de rigidité et moins de poids, il conserve les lignes tant admirées par les adeptes des MV Agusta. Le système de biellettes est en haut, et il est possible de lever la moto vers l’arrière pour la rendre encore plus agile. Il n’y a pas de changements de l’amortisseur, Sachs continue à faire en sorte qu’on puisse ressentir très fidèlement les sensations du train arrière. Et l’impressionnant cadre mixte (tube en acier sur sa partie avant, et à platines en aluminium jusqu’à l’ancrage du bras oscillant) a été modifié sensiblement pour contribuer à une meilleure agilité de la F4.
Si l’esthétique n’a pas changé depuis 2000, la motorisation si. Un grand nombre de variations sur le moteur à soupapes radiales a fait passer de la cylindrée des 750 cc initiales aux 1078 cc finales, avec un résultat réellement intéressant quant à la puissance finale. Pour cette dernière version de 998 cc, on a équipé le vilebrequin de 47% de poids en plus, mais en compensant ce poids supplémentaire avec des bielles plus légères. Ainsi le moteur a gagné en bas régimes et a augmenté substantiellement sa souplesse. Je pense que le changement est réellement positif: le moteur devient élastique et très souple jusqu’à 9000 rpm, et à partir de là il garde le meilleur pour la partie haut régime. Un résultat très puissant: 186 CV au vilebrequin, mais beaucoup plus pratique et facile à négocier que pour les versions précédentes. Et pour ceux qui ne veulent pas se risquer à mettre les gaz, un subtil contrôle de traction réglable en 8 points offrira à tout le monde une confiance supplémentaire. Le double injecteur par cylindre contribue énormément au fantastique tact de l’accélérateur, qui a changé du tout au tout. Des éléments comme la pompe à eau, l’alternateur, l’airbox et la boite de changement de vitesses ont aussi été remplacés par d’autres plus efficaces, et qui associés les uns aux autres, font du moteur de la nouvelle F4 l’un des plus plaisants à gérer parmi ceux des SBK actuelles. On a ajouté un radiateur supplémentaire pour l’huile, qui associé à celui du liquide de refroidissement (de taille généreuse), se charge de maintenir la température sous contrôle à tout moment. Durant les sessions de photographies que nous avons faites sur la route, le système de ventilation ne s’est même pas activé, alors que nous avions laissé la moto à l’arrêt avec le moteur allumé pendant un bon moment. Nous avons été très satisfaits de voir que le personnel de MV Agusta sait ce qu’il fait, et que s’il n’avait pas changé la moto avant, c’était dans la peur de gâcher un modèle aussi remarquable. Je peux affirmer catégoriquement que la nouvelle F4 est une moto bien meilleure que ses prédécesseures, pas dans les finitions ni les détails, mais dans son comportement sur piste. La nouvelle F4 est agile et précise, et il n’est pas nécessaire d’être pilote professionnel pour profiter de toutes les sensations qu’elle transmet.
Les quatre tours sur le circuit de Tabernas étaient largement suffisants pour nous rendre compte d’une chose: la nouvelle F4 n’est pas seulement un objet culte, mais elle peut être aussi une excellente moto sur routes ou une bonne compagne pour les adeptes des tours de piste. Le moteur nous a permis de pousser jusqu’à 274 km/h en ligne droite, et réduire ensuite la vitesse n’a pas posé de problèmes grâce à un puissant équipement de freinage Brembo et un excellent embrayage anti-rebond. Si une caractéristique principale différence les modèles de cette élitiste marque de la majorité des autres motos du marché, c’est sans doute la qualité des matériaux et l’attention avec laquelle elle a été construite. La carrosserie, par exemple, reste d’une qualité supérieure à la concurrence, qu’elle soit japonaise ou italienne. Le cadre soudé à la main, la peinture, ou les détails de l’installation électrique parfaitement ordonnée font de ce modèle MV une moto digne d’admiration. Le tableau de bord a aussi changé: maintenant il est totalement digital, beaucoup plus fonctionnel et claire que le précédent. On peut régler l’intensité de lumière selon que l’on conduit de nuit ou de jour. L’unique faille que nous avons rencontrée est la taille des lumières de sur-régime, trop petites pour être vues correctement. Plus près du réservoir, on trouve l’amortisseur de direction réglable, et de chaque coté, les déjà mythiques et exclusives pompes de frein et l’embrayage Nissin, spécialement réalisés pour MV Agusta. En définitive, le symbole le plus caractéristique de la F4 est le silencieux à quatre sorties. Dix ans après, on a remplacé ses formes ovales par des rectangulaires. On a aussi rafraîchi d’autres traits spécifiques à la F4, comme le phare avant en forme rhomboïde, qui voit sa taille réduite et son style modernisé. Il faut souligner aussi l’agréable lumière blanche des phares de position, produite par son ampoule au xénon à leds de haute luminosité. Mais le meilleur dans tout cela c’est que le fabricant a réduit considérablement le prix comparé à la version précédente, jusqu’à 18 700 euros. Qui a dit que les rêves ne devenaient jamais réalité?
Edu Fernández Photos: Milagro Traduit et adapté par Pauline Balluais