Les techniciens d’Akashi ont voulu construire une moto plus sportive sur les pistes, et le résultat est une moto aussi plus confortable. Le châssis de la nouvelle Ninja est aussi rapide que majestueux… Pas de réaction imprévisible indépendamment du rythme qu’on lui impose. Le nouveau moteur s’est construit en partant de celui utilisé pour son prédécesseur, mais se montre beaucoup plus rempli à moyen régime. Le fonctionnement de la fourche Showa BPF surprend par son ressenti doux et précis mais aussi par sa sensibilité aux réglages. Sur l’île volcanique de Kyushu, au sud du Japon, se trouve une petite ville appelée Kumamoto. Aux alentours de cette ville, presque caché au fin fond d’une vallée spectaculaire on trouve un circuit, pas moins spectaculaire, appelé Autopolis. C’est une piste exigeante, combinée de montées et descentes prononcées, de chicanes lentes, de virages à droite, à gauche…et d’une grande ligne droite sur laquelle on passe la sixième et on profite de la forte dénivellation de la route pour atteindre une bonne vitesse de pointe avant de freiner sur le premier virage, en seconde. Pourquoi vous parler en long et en large de cette piste que vous ne connaissez ni d’un championnat mondial ni d’un jeu vidéo? Car cette piste est, depuis quelques temps, propriété de Kawasaki et que sur celle-ci est née, après de nombreux, très nombreux tours, la nouvelle ZX-6R.
Des heures et des heures d’essai ont fini par faire naître la géométrie, la mise au point des suspensions, du caractère du moteur…Les milliers de détails qui font qu’une moto est confortable ou intrépide, vive ou lourde, etc. Rien qu’en la voyant, on peu déjà affirmer que la nouvelle ZX-6R 2009 est beaucoup plus stable et compacte que son prédécesseur et qu’elle présente des lignes agressives et incisives remplaçants les lignes douces et arrondies. C’est un calque assez fidèle de la ZX-10R sortie début 2008 ; certains novices pourraient même les confondre ! En revanche, les experts remarqueront le pot d’échappement (moins volumineux), le pneumatique arrière (180/55 contre 190/55 pour la 1000) ou la stabilité des poutres du cadre (massives sur le tronçon central pour la SBK). On remarque aussi à vue d’œil la différence entre les étriers de frein (Tokico sur la 10 et Nissin sur la 6) et l’intégration parfaite des clignotants avant dans les flancs de carénage de la super sport (dans la ZX-10R ils sont posés sur les bras des rétroviseurs). Mais mis à part ces détails, il est facile de les confondre lorsqu’elles sont côte à côte. Cependant, l’évolution de la nouvelle Ninja n’est pas seulement esthétique, elle va beaucoup plus loin…On indique une baisse de presque 10 kg à sec (7 kg sur le châssis et 3kg sur le moteur). On le sens incontestablement puisque notre invitée fait maintenant partie des super sports les plus légères à pousser à l’arrêt.
Une des grandes nouveautés de la Ninja est l’incorporation de la fourche Showa BPF (Big Piston Fork). Pour la saison 2009, seulement deux modèles en bénéficient: notre invitée et la GSX-R 1000. Kawasaki met à notre disposition la première de ces motos commercialisées avec cette suspension avant novatrice qui, de l’extérieur semble être une simple fourche inversée multi-réglable, mais qui à l’intérieur est bien différente. En effet, la suspension avant n’utilise pas une fourche classique à cartouche mais une structure très simple dans laquelle on se passe du piston inférieur et du cylindre interne (le piston unique coulisse directement dans le tube). Les avantages sont multiples, par exemple il y a moins de pièces en mouvement (cela diminue les frictions et le poids global). Le diamètre du piston augmente jusqu’à atteindre 3,4 fois plus de superficie qu’une Showa inversée à cartouche de version 07/08 : avec le même 41/120 mm elle passe de 20 à 37 mm de diamètre ce qui permet d’avoir plus de contrôle sur l’huile avec des réglages plus précis et moins importants. Selon les techniciens de Showa, le temps de montage et démontage diminue de 10% par rapport è celui requis avec une fourche à cartouche. Le tampon supérieur incorpore le cadran de réglage de compression et détente, alors que la précharge du ressort se règle depuis les pieds de fourche, avec une clé allen.
L’architecture de son moteur, classique pour sa catégorie, nous la connaissons tous : 4 cylindres en ligne à refroidissement liquide, deux arbres à came et 16 soupapes. Les axes sont désalignés pour gagner en compacité, et la ZX-6R a hérité des carters et de la structure du modèle précédent. Cependant, elle est légèrement plus inclinée vers l’avant et le centre de gravité a été relevé de 16 mm ce qui améliore les entrées en virage et les changements d’inclinaison. Sa puissance augmente à 128 ch et atteint même 134 ch avec le système Ram air. Et nous parlons là de chiffres qui s’atteignaient il y a une dizaine d’année avec des moteurs de ¾ de litre et sans les règlementations aussi strictes sur les émissions polluantes. Impressionnant ! Les valeurs de couple varient à peine (6,8 kgm à 11 800 tours) mais c’est que le couple maximum dépend directement du cylindrée. Ces chiffres ne servent à rien si on ne vous explique pas que la Ninja a déjà du punch en dessous de 5500-6000 tr/min et que son véritable caractère se dévoile à 8000. Sa courbe de puissance est maintenant plus pleine mais on observe plus de différence à moyen régime. Le mérite revient aux injecteurs Keihin de 36 mm, 10 mm de plus qu’avant avec double papillon, double injecteur, admission à double ouverture…Les deux premier systèmes ne sont pas une nouveauté mais les deux tuyères d’échappement créent une turbulence qui accélère le remplissage des cylindres à moyen régime. L’image de la 600 classique est derrière nous, place à la nouvelle Ninja !
Les capots du moteur en magnésium abritent des doublures réductrices de bruit et les guides de la chaîne de distribution sont beaucoup plus précis que les autres modèles de ZX-6R. Le résultat : un son à peine perceptible lorsque le propulseur tourne au ralenti à chaud ; et lorsque l’aiguille s’approche de la zone rouge, le rugissement provenant de l’admission reste très modéré. Le silencieux, placé sur le côté droit de la moto a plus de style avec son nouveau design et les collecteurs sont tortueux afin d’optimiser les performances en bas régime. Le tact des gaz est précis : il fourni toujours une information clair sur ce qu’il va transmettre à la roue arrière. Pour accélérer il n’est pas nécessaire de pousser le moteur jusqu’à passer l’aiguille dans la zone rouge qui se situe à partir de 16 500 tr/min, car la plage d’utilisation idéale pour exploiter au mieux la moto est juste un peu en dessous.
L’échelonnement de la boîte à vitesse nous a paru parfait. La seconde est suffisamment longue pour ne pas trop ralentir en relâchant l’embrayage avec l’accélérateur fermé. Le passage en troisième est fluide ce qui permet d’avoir une accélération constante, sans inflexion à la sortie des virages. Quant à la sixième, elle permet d’arriver à des valeurs proches de la puissance maximum. Rien à voir avec le dernier rapport exagérément long pour les super sports en général, ce qui la rend beaucoup plus performante en circuit. La Ninja ne présente aucune imprécision et l’embrayage anti-dribble contribue à garder la moto sous contrôle lors des freinages les plus violents. Une dernière caractéristique qui peux passer inaperçue mais qui est de toute importance: la chaîne est en pas 520, utilisé habituellement pour les compétitions au lieu des 525 usuels pour les 600 sur route. La NX-6R gagne ainsi beaucoup en accélération et en légèreté.
Les pneumatiques utilisés durant l’essai étaient les Bridgeston BT-003, et non les BT-016 pour s’adapter aux basses températures appréciés sur le circuit japonais. Cependant cela n’a changé en rien le comportement de la moto très sportive. Le châssis sur lequel s’unissent les supports avant du moteur et la pipe de direction possède deux poutres latérales plus flexibles. Les supports arrière du propulseur s’unissent maintenant à la barre transversale centrale du châssis qui accueil le cadre arrière. Ainsi, la répartition de la rigidité avant/arrière est optimisée. La direction est un degré plus fermé qu’avant pour une distance entre les axes similaire, on ne remarque ainsi aucune nervosité. La BPF offre un tact beaucoup plus contrôlé. Lorsque la fourche s’actionne, le tact de la roue avant est excellent. L’amortisseur Showa possède une compression réglable en haute et basse vitesse et le freinage est facile à gérer puisqu’il se montre puissant et dosable. On préfère toujours plus les étriers Nissin de la 600 que les Tokico de la 1000. Un responsable de la marque a même confessé être d’accord avec nous : meilleure finition et plus grande durabilité.
Maniable à l’arrêt ou en marche, les commandes sont à leur place, le réservoir est étroit et quelque soit la taille du conducteur tout est fait pour qu’il ait une position de conduite agréable… La nouvelle Ninja nous laissée une impression plaisante et se présente comme la moto la plus raffinée de sa catégorie; aussi sportive que les plus intrépides des ZX-6R mais à la fois humaine et confortable comme l’était la génération antérieur. On ajoute à cela une bonne dose de puissance et de légèreté… Une combinaison pas facile à trouver ce qui mérite un grand applaudissement aux techniciens d’Akashi qui ont réussi à rendre la plus sportive des Ninja tendre avec celui qui la conduit.
Luis Morales Photos: Kawasaki Traduit et adapté par Gaela Le Janne