Atteindre un objectif n’est pas toujours facile, mais il est possible d’y parvenir en persévérant, même si sur le chemin il faudra apporter beaucoup de conviction, de plaisir, de travail et d’effort. C’est ce qu’a fait KTM avec sa moto gagnante de l’IDM.
Un jour réel
J’ai testé la RC8 en Allemagne, sur le circuit d’Hockenheim. Je me suis rendu au box de KTM en quelques minutes, et après un petit breafing, j’ai pu voir et toucher la moto. En réalité, j’allais en tester deux : la championne de Martin Bauer, pilote autrichien expérimenté de 36 ans, et la troisième au classement général, de Stefan Nebel, pilote allemand de 30 ans, deux fois vainqueur de l’IDM. Les deux motos appartiennent à deux équipes différentes : celle de Martin Bauer appartient à l’équipe autrichienne de Red Bull et celle de Nebel à l’équipe tchéco-allemande Ing Art.
Mis à part le réglage spécifique à chaque pilote, la seule différence technique entre les deux motos réside dans les suspensions. Celles de l’équipe de Nebel sont de marque WP, alors que celle de Bauer sont des Öhlins.
Les règles du championnat de l’IDM quant à la préparation permettent peu de changements structuraux. Sur les RC8, la plupart des évolutions et transformations concernent : les carénages en fibre, les jantes légères, le sous cadre en carbone, des pneumatiques slick Dunlop, les freins à disque homologués, les étriers homologués, les plaquettes homologuées, l’amortisseur arrière, la cartouche inférieure de la fourche et l’huile (on conserve les tubes d’origine), les pédales, le shifter semi-automatique, le levier de changement inversé, l’amortisseur de direction, les manettes et les semi-guidons.
Concernant le moteur, on peut modifier la compression des culasses, l’allumage, les filtres, l’airbox, les échappements, et toute l’électronique. Pour ces modèles, KTM utilise le contrôle de traction réglable et un système de télémétrie Magneti Marelli à écran digital avec toutes les informations sur les valeurs.
La RC8 R 1190, en accord avec les règles de l’IDM, développe une puissance de 190 CV à 10 500 tr/min. Elle déclare un poids réel avec le réservoir plein de 179,5 kg et atteint une vitesse maximale de 301 km/h.
Hockenheim est un circuit qui impose par son histoire, mais aussi par son tracé, rapide et technique, et composé d’une ligne droite terrible précédée d’un virage très large, d’un freinage inhabituel, d’une fourche compliquée, d’une infinité de virages enlacés avec peu de visibilité et du mythique et étroit Motodrom, qui débouche sur une courte ligne d’arrivée. Son parcours est de 3 692 m dans sa version courte si l’on tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, et le record, détenu par Martin Bauer avec la KTM, est de 1.27.332 min à 152,192 km.
Après avoir discuté avec les ingénieurs et McWilliams du comportement de la moto et du circuit, le moment de vérité est arrivé. La moto avait subi quelques changements. Le mono-échappement de sortie inférieur, au bruit phénoménal et intimidant, a été remplacé par une double sortie latérale Akrapovic pour passer le test de décibels. Les allemands sont très scrupuleux sur ce thème. Le jour de la course, on a permis un niveau de décibels maximum plus élevé que le jour du test, à cause de la présence du public.
Le rêve continue
J’ai ajusté la manette de la moto du dorsal 9 et pendant un instant je me suis senti important. J’ai ouvert l’accélérateur à fond ; on m’avait prévenu que l’un de ses meilleurs atouts était son grand couple moteur, et c’est ce que j’ai pu vérifier. La moto a enchaîné trois vitesses sans que la roue avant ne retombe au sol, et sans passer au dessus de 7000 tr/min.
Je suis arrivé sur la ligne droite et j’ai poussé le moteur dans le rouge jusqu’à environ 11 000 tr/min. La moto est restée stable. La fourche de presque 180 degrés tourne avec beaucoup de facilité, comme un compas, c’est-à-dire que j’ai senti que l’axe de tour était situé dans ma colonne. Il suffisait de fixer la sortie du virage du regard pour que le reste du corps et la moto suivent sans broncher. Elle a beaucoup d’aplomb et sa capacité de tour est énorme. Elle chancelle un peu dans les entrées de virages enlacés, et dans les fortes inclinaisons je n’ai pas vraiment pu faire confiance à l’appui avant ; j’ai dû attendre que quelqu’un me devance pour suivre une trajectoire fiable. J’ai vite appris la piste, au bout de six tours seulement. Je me suis concentré au maximum et j’ai tenté de prendre un rythme constant.
J’ai ensuite commencé à freiner et j’ai senti le frein moteur, sans embrayage anti-rebond. Le freinage est une tâche compliquée car le système de rétention antiblocage utilisé est une combinaison d’ouverture et de fermeture des soupapes d’échappement et de l’admission du moteur, qui nécessite un grand temps d’adaptation. Il est difficile de faire glisser la moto. Il faut rouler finement et profiter de son excellent passage dans les virages, bien supérieur à celui des autres motos de la catégorie.
Je suis entré à nouveau sur la pit lane avec une sensation aigre-douce, puisque je n’ai pas pu profiter de tout le potentiel de la moto, mais j’ai déjà beaucoup d’informations sur le circuit qui seront utiles pour le second tour. Les ingénieurs et McWill se sont approchés pour recueillir mes impressions. Les sensations étaient phénoménales.